Le zona est caractérisé par une inflammation de la peau conduisant à la formation de vésicules purulentes (érythème) s’étalant le plus souvent sur le côté dorsal du thorax à différents niveaux. Cette inflammation est accompagnée d’une douleur très forte, profonde, qui dépasse de loin la brûlure des vésicules. Ces symptômes très invalidants peuvent durer plusieurs semaines. Des complications peuvent survenir si l’érythème se développe dans la région oculaire (perte de la vue, attaque du nerf optique..).
Prévalence
La maladie ainsi décrite atteint surtout les personnes âgées. Aux Etats-Unis, où les statistiques existent et sont en général fiables, près de 1 million de cas sont recensés chaque année dont les deux-tiers surviennent chez des personnes de plus de 50 ans. Au-delà de 85 ans, la probabilité de développer un zona grimpe à 50%. L’incidence de la maladie est identique chez les hommes et les femmes. Le zona n’est pas une maladie saisonnière, elle survient à tout moment de l’année.
Le virus
Le zona est provoqué par un agent infectieux, le virus de la varicelle (VZV, pour Varicella-Zoster Virus en anglais, cf. article précédent). Ce virus fait partie de la famille des virus herpétiques humains où l’on trouve, les virus Herpès de type 1 et 2, infectant les muqueuses buccales ou génitales, le virus d’Epstein-Barr, agent de la mononucléose infectieuse, le virus de la roséole infantile, pour ne citer que 5 des 8 virus répertoriés à ce jour chez l’humain. Le monde animal regorge de nombreux virus de la même famille, allant du singe à l’huître en passant par l’écureuil, les bovins, les chevaux, les félins, et j’en passe.
VZV, comme tous les virus de la famille est un virus à ADN double brin, ce qui signifie que son génome est composé du même matériel génétique que celui des cellules qui nous constituent. Ceci a son importance pour expliquer son mode d’infection (voir ci-dessous). Les particules virales contiennent une enveloppe lipidique, dans laquelle des protéines sont insérées tournées vers l’extérieur. A l’intérieur, le génome est compacté dans une structure protéique appelé la capside. Il a la particularité d’afficher à l’image une zone floue tout autour de la capside, le tégument. Le tégument contient des dizaines de protéines virales nécessaires à orchestrer le début de la multiplication virale et à contrevenir aux réponses de défense de la cellule infectée, une véritable boîte à outils. Pour être certain de disposer de ces outils dès le départ, le virus les apporte avec lui.
L’infection
L’histoire commence dans l’enfance avec la varicelle provoquée par le VZV, une maladie que près de 100% de la population infantile développe (ceci avant l’advenue des vaccins), et que tous les parents attendent de voir. Le virus se transmet très efficacement par les échanges de salive, par les gouttelettes projetées par la toux ou par contact avec des surfaces contaminées par le liquide des éruptions qui surviennent 10 à 20 jours après contagion.
Les premières cibles cellulaires notoires après l’infection de cellules de la muqueuse buccale (1.) ou nasale sont les lymphocytes T présents dans les ganglions lymphatiques voisins de la porte d’entrée (2. Amygdales). Les lymphocytes T participent ensuite à la dissémination (3.) du virus par les capillaires sanguins (4.) dans tout l’organisme avec finalement infection (5.) des cellules de l’épiderme. Se développe à ce stade l’image classique de la varicelle avec la foison de petites pustules dont le liquide est rempli de virus infectieux. Ces pustules finissent par se crouter et disparaître en laissant ou non de petites cicatrices. L’infection se résout généralement sans problèmes, du moins chez le petit enfant.
Pourtant, cette résolution ne voit pas le virus disparaître de l’organisme, car lors de l’infection des cellules de l’épiderme, une fraction de virus pénètre dans les terminaisons nerveuses sensitives (6.) qui innervent l’épiderme. Le virus entame alors une migration le long des nerfs (7. mouvement rétrograde) vers le corps des cellules nerveuses qui se situent dans les ganglions sensitifs.
Le génome viral finit sa course dans le noyau des cellules nerveuses où il s’établit comme un nano chromosome, perdu au milieu des chromosomes cellulaires. A ce stade, le génome reste dormant (8.), il ne dirige la synthèse d’aucune molécule virale. Il passe donc totalement inaperçu et persiste sous cette forme aussi longtemps que la cellule elle-même. Pour qui connait les virus, c’est malin mais totalement contreproductif. Les virus ne continuent à exister que s’ils peuvent être transmis à un nouvel hôte.
Cette transmission est possible si le génome viral se réveille (9.). On dit qu’il se réactive avec comme résultat la production de toutes les protéines virales nécessaires à la multiplication et à la formation de nouvelles particules virales. Ces virus migrent le long des nerfs vers la périphérie (10.) et finissent par infecter les cellules de l’épiderme (11.) ou des muqueuses et provoquer le zona, qui se développe comme une inflammation de la zone innervée par les cellules nerveuses issues d’un ganglion particulier (dermatome).
On sait peu de choses certaines sur les facteurs qui provoquent la réactivation. Une manière de l’envisager est de postuler qu’elle se fait aléatoirement, mais qu’elle passe inaperçue pour autant que la réponse immune contrôle efficacement la dissémination du virus. Ce n’est que si la réponse immune est affaiblie que les virus se propagent et que les symptômes du zona se manifestent. Comme avec l’âge qui avance, l’efficacité de la réponse immune diminue, on comprend pourquoi le zona se manifeste chez les personnes âgées. Il peut très bien affecter également les personnes plus jeunes immuno-supprimées.
Traitements et vaccins
Deux ou trois médicaments anti-viraux sont disponibles (acyclovir, valacyclovir, famciclovir..). Ils sont administrés par intraveineuses (acyclovir) ou par une prescription orale (valacyclovir..), en fonction de la gravité des symptômes. Leur efficacité est d’autant plus grande qu’ils sont administrés tôt après le diagnostic. Ils ciblent l’étape de duplication génome en arrêtant la progression de la synthèse d’ADN viral.
Depuis la disponibilité d’un vaccin atténué pour prévenir la varicelle chez les enfants, ce même vaccin a été administré à plus forte dose chez les personnes à risque de développer un zona, à savoir les personnes âgées et les patients immuno-supprimés. Avec un effet protecteur de 60% pendant 3 ans. Plus récemment un vaccin issu de la technique du génie génétique a été mis au point. Une protéine virale, la protéine E, impliquée dans la propagation du virus de cellule à cellule est synthétisée et administrée avec un adjuvant particulièrement efficace pour déclencher une inflammation et « faire prendre » le vaccin.. Ce vaccin (Shingrix) atteint un taux de protection de près de 90% pendant une période de 10 ans. Ce vaccin a également l’énorme avantage d’annuler le risque de propagation du virus présent dans le vaccin atténué chez les personnes immuno-supprimées.
Figure adaptée de Fields Virology, 7th edition, vol 2 : DNA Viruses : Chap 13 : Varicella-Zoster Virus. Ann M. Arvin and Allison Abendroth. 2022 Wolters Kluwer.